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Deepshikha Parmessur: Le renouveau de la politique

Deepshikha Parmessur

Du haut de ses 24 ans, Deepshikha Parmessur incarne ce renouveau politique tant réclamé à l’île Maurice. Son objectif: aider à remettre le pays sur les rails, avec un développement à visage humain. Son rêve! Participer aux élections générales et pourquoi pas devenir la première Première ministre de notre petite ile. Rencontre avec une vraie patriote.

Comment décririez-vous votre participation aux dernières élections villageoises?

Participer aux élections villageoises était inattendu. La politique m’intéresse mais je m’étais dit que j’avais beaucoup de choses à apprendre. Mon objectif est de participer, un jour, aux élections générales. Néanmoins, comme les gens souhaitaient voir un renouvellement de la classe politique avec de nouveaux visages, je me suis dit que je pouvais essayer d’incarner ce renouveau, en participant aux élections villageoises. 

Ma décision d’être une candidate indépendante vient du fait que je souhaitais m’associer à des causes et non pas à des personnes. Jusqu’à présent, je n’ai rencontré aucune personne ou aucun groupe avec les mêmes priorités ou les mêmes valeurs que moi. J’ai donc décidé de mener ce combat en tant que candidate indépendante.

Ça n’a pas été facile! Évidemment j’ai été sujet à des commentaires sur le fait que je sois une fille, ou que je sois trop jeune ou ma capacité à apporter quelque chose à mon village. 

Mais pendant ma campagne, au fur et à mesure que je présentais mes idées et ma vision des choses, j’ai pu alors engager une interaction avec les gens. Les conversations sont devenues plutôt faciles. On ne me considérait plus comme une jeune fille de 24 ans sans expérience, mais comme n’importe quel candidat qui venait faire campagne pour participer au développement de notre village.

Avez-vous été approchée par un parti politique traditionnel?

Oui, j’ai reçu des invitations pour rejoindre des partis politiques. Mais je ne suis pas prête pour prendre une telle décision.  Comme je l’ai mentionné précédemment, je ne veux pas être associée à des groupes, du fait que ces derniers sont dirigés par telle ou telle  personne, ou parce qu’ils appartiennent à telle communauté. 

D’où vous vient cette passion pour la politique?

Initialement, je voulais faire carrière dans la danse,  j’adore la danse. Mais j’ai eu un déclic quand je suis partie étudier aux Etats-Unis. Là-bas, j’ai rencontré des Américains qui étaient vraiment passionnés par leur pays. Ils agissaient en vrais patriotes!

J’étais là-bas lors des élections américaines de 2016,  remportées par Donald Trump. Ils voulaient savoir si tout le monde allait voter, comprendre les prises de position de certaines personnes ou les actions entreprises par le Président…

Lorsque j’ai constaté ce patriotisme qui animait ces jeunes, je me suis demandé: “Pourquoi n’ai-je pas le même sens de patriotisme envers mon pays? Pourquoi me suis-je déconnectée de mon pays à ce point?”. 

En engageant la conversation avec d’autres jeunes, j’ai constaté qu’ils se souciaient de ce qui se passait notamment au niveau de la politique, ou de l’éducation, entre autres. Donc, petit à petit, j’ai commencé à m’y intéresser moi aussi. j’ai réalisé qu’il y avait beaucoup à faire à Maurice, en particulier pour les jeunes. 

Il y a toujours eu cette narration qui veut que les jeunes Mauriciens quittent le pays en raison du manque d’opportunités. Mais pour moi, ce n’était pas le cas, si j’ai quitté le pays c’était surtout pour savoir comment sont les choses loin de notre petite île. Cependant j’ai toujours eu l’intention de revenir au pays. 

C’est notre pays! Pourquoi s’en aller? Pourquoi se sauver? Pourquoi ne pas remettre notre pays sur les rails pour éviter de voir nos jeunes s’exiler ailleurs, ou du moins créer l’envie pour qu’ils reviennent.

Selon vous, quelles sont les qualités que l’on doit posséder pour faire de la politique?

Honnêtement, j’ai été choquée lorsque j’ai consulté le document officiel pour connaître les critères pour participer aux élections villageoises. Il n’y avait que deux critères principaux: la personne doit parler l’anglais et le français, et elle doit être enregistrée comme votant. 

Personnellement, je pense que si une personne choisit de faire de la politique, elle doit être passionnée par ce qu’elle fait. 

Il ne faut pas se dire qu’on veut faire de la politique car on veut faire telle ou telle chose. La politique se fait car on s’est aperçu qu’il y a un manque en ce qui concerne l’environnement ou l’éducation, par exemple, et vous pensez pouvoir apporter votre aide. 

On doit d’abord identifier le problème et se demander pourquoi est-on passionné pour le résoudre? 

Malheureusement, à Maurice, ce que j’ai remarqué c’est que pour pouvoir apporter de vrais changements, il faut avoir une sorte de ‘pouvoir’, comme être populaire pour être pris au sérieux, surtout en tant que jeune. 

Afin de servir dans la politique, je pense qu’il n y a pas de critères spécifiques, il n’y a pas un degré ou un type de personnalité spécifiques. Il faut juste être passionné et avoir un but pour le pays. Par exemple, moi je suis passionné par l’environnement. Personne ne sait vraiment quoi faire à propos du changement climatique. Il n’y a pas vraiment de propositions mises en avant dans ce domaine. 

Donc, je pense qu’il nous faut être poussé par notre passion et que nous travaillons pour cette dernière. 

Donc, vous ne faites pas de la politique pour remplir vos poches comme certains?

Exactement.

Parlons un peu de la National Youth Parliament 2019. Vous étiez la première Première ministre. Quel est votre sentiment par rapport à ça?

Le National Youth Parliament est fictif, c’est vrai. Mais l’idee qu’une femme puisse devenir, un jour, Premiere ministre, ne l’est pourtant pas. C’est tout à fait dans le domaine du possible. C’est juste que ça n’a jamais été le cas à Maurice.

Au début, c’était stressant car c’était la première fois qu’une fille occupait ce poste mais c’était aussi la première fois que l’événement était en livestreaming. J’avais un poids sur les épaules, car je devais démontrer qu’il était bel et bien possible qu’une femme occupe ce poste. C’était peut-être une mise en scène mais cela est possible dans la vraie vie. 

Que pensez-vous de notre situation politique actuelle? Quel est votre avis sur les travaux parlementaires?

Je pense qu’on est un peu perdu en ce qui concerne nos priorités à l’île Maurice. On s’est tellement engagé dans une politique d’identité qu’on a oublié la politique des causes. 

Par exemple, nous avons un système d’éducation qui est dépassé. On se concentre plus sur les résultats et pas pas assez sur le processus d’apprentissage.

Quand on demande à un jeune des choses très basiques, comme ce qu’il sait de la pauvreté ou du changement climatique. Il vous des réponses tirées des manuels scolaires. Il ne sait pas transposer la problématique dans des situations réelles. 

Nous devons former la nouvelle génération pour qu’elle devienne des citoyens qui comprennent les problématiques auxquelles fait face notre pays. 

Depuis l’indépendance, nous nous sommes trop concentrés sur le pouvoir et pas assez sur le développement humain. Nous faisons des projets qui n’apportent pas forcément grand-chose à la population. Nous ne pensons que sur du court-terme. 

Idem pour les travaux parlementaires…. Nous sommes arrivés à une situation où l’on préfère débattre sur la personne au lieu de débattre les idées.

Nous sommes arrivés à un point où nous attendons d’être face à un problème pour chercher une solution. 

Pourquoi nous ne pouvons pas réfléchir en amont avant d’être dos au mur. Prenons le changement climatique, nous pouvons d’ores et déjà commencer à éduquer la population sur ce qui risque de nous arriver. 

On est plus occupé à s’abaisser les uns les autres que de se concentrer sur le travail qu’on est supposé faire. 

Si vous étiez notre Première ministre, quel est le premier dossier que vous aborderiez en priorité?

L’éducation, car je pense que c’est très important. A maurice, nous avons une conception très réductrice de ce qu’est une personne éduquée. L’accent est plutôt sur la qualification académique que possède la personne. Il y a donc un gros travail à faire, tous ensemble, car il y a plusieurs manquements dans notre système éducatif. Prenons l’entreprenariat. On parle de soutenir les entrepreneurs à travers des allocations financières et d’autres facilités. Mais pourquoi ne pas commencer par inclure un programme au sein des écoles pour les sensibiliser et les former assez tôt à l’entrepreneuriat . 

Avec la Covid-19, on doit se tourner vers les ressources internes dont nous disposons. La population mauricienne représente une ressource possédant beaucoup de potentiel mais dont nous ne savons pas comment l’utiliser. On fait appel à des ressources humaines et toutes sortes d’experts de l’étranger alors que nous aurions pu former les Mauriciens, car après tout, ils connaissent déjà le pays, le système et les problèmes auxquels nous sommes confrontés. 

Pour moi, le développement de la population à travers l’éducation sera la première tâche à laquelle je m’attellerai. 

Y a-t-il un parti politique qui porte des valeurs similaires aux vôtres?

Non, mais je suis optimiste qu’un jour il y aura un nouveau parti ou un renouvellement dans les priorités et les façons de faire des partis actuels de sorte à ce qu’il y ait un parti qui pourrait m’intéresser.

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